Résumé
L'œuvre de Pindare, telle qu'elle a été transmise au-delà du monde grec, apparaît aux poètes capables de la lire, d'en analyser les éléments et d'essayer de rivaliser avec elle, comme la forme la plus parfaite d'une certaine poésie. Sur le plan des êtres, c'est un monde où dieux, héros et hommes sont rangés par clans, comme dans un monde aristocratique, selon une hiérarchie de la gloire octroyée par le maître des dieux. Le poète, marqué d'un signe divin dès sa naissance, a conscience du rôle de porte-parole des événements ou des aspirations d'une époque, tantôt dans le monde aristocratique, tantôt dans le peuple, ou celui d'intermédiaire entre le monde divin et le monde humain, par la prière, comme le prêtre, par la connaissance de la volonté divine, reçue directement, comme le prophète. Il a la certitude que la poésie, langage parfait, apporte l'immortalité à la fois au poète et à celui ou à ce qu'il chante : l'éloge d'un notable de son temps, est lié à la conviction que cette postérité sera plus durable que celle des inscriptions sur les monuments. Le « grand lyrisme » est exaltation. Sur le plan des idées, le poète élimine ce qui est impie et bas, mais la souffrance peut servir d'épreuve pour les forts. Le poème a une architecture savante, fondée plutôt sur l'association que sur une structure logique. Il comporte des maximes, expression de l'exemple moral. Il contient un ou plusieurs mythes, en accord avec le personnage, l'environnement ou la situation. Il utilise une langue distincte de celle de la prose, et comportant beaucoup d'images. Il associe l'ampleur de la strophe à celle de la phrase lyrique. Il sert de support à la musique et même, éventuellement, à une chorégraphie. Mais si le mythe de l'inspiration demeure, si le mécénat se poursuit, l'éloge poétique des vainqueurs aux Jeux n'existant plus, les poètes qui s'inspireront de Pindare devront chercher de nouveaux « Héros » et, à partir d'une certaine époque, utiliser de nouveaux mythes. L'essence de la poésie pourra prendre la forme du symbole, qui associe étroitement pensée intuitive et image. On peut alors se demander s'il existe un « pindarisme », comme il a existé un « pétrarquisme », les poètes ayant en commun une conception de l'amour, des thèmes, des comparaisons et une forme rythmique : la poésie devenait un exercice intellectuel et technique, autant que l'expression du sentiment.