Résumé
Le présent ouvrage rassemble vingt-six textes en provenance de la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane, la Réunion, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie. Leurs auteurs ont accepté de mêler leurs voix sur un thème qui leur est apparu commun à l'ensemble de l'outre-mer français : la cohabitation dans les esprits de sentiments dont la conciliation n'est pas aisée. Si la brutalité de la domination coloniale n'est plus qu'un mauvais souvenir, l'humiliation, elle, perdure, entretenue par les trop fréquentes attitudes de mépris dont les populations font, aujourd'hui encore, l'objet, et pour la légitimation qu'elle procure à leur posture de créanciers de la République. Un ressentiment diffus l'accompagne, que certaines situations réveillent, et qu'une large part des élites - politiques, intellectuelles et artistiques - entretient : adossé au sentiment de ne pas faire partie, historiquement, géographiquement et culturellement, de la Nation française, il nourrit un rêve indistinct d'émancipation. Face à ce versant, un autre, symétrique. Ces communautés, dans leur complexité, sont fruits de l'aventure coloniale : elles se savent filles de la France, et lui sont attachées à plus d'un titre. Pour les conditions de vie matérielles qu'elle leur procure, certes, en les maintenant à l'abri des exigences de plus en plus impitoyables de l'économie de marché ; mais aussi par une réelle fierté d'appartenir à la République, cette entité mythique, à la fois distante et proche, hautaine et généreuse, qui a finalement su imposer sur place, aux tenants de l'ordre colonial, cette égalité de traitement qui a, certes imparfaitement, pansé maintes blessures. Sur le terrain du droit, de l'histoire et de l'analyse politique et sociale, cet ouvrage montre comment, dans tous ses territoires et départements d'outre-mer, la double aspiration subsiste par rapport à la France : être la fois de plus en plus « dehors » et de plus en plus « dedans ».