Résumé
« Ah, saura-t-on jamais la vérité vraie ? »... Depuis des décennies, sinon des siècles, cette interrogation exprime le doute populaire face aux vérités successives, vérités officielles dont la seule fonction fut, si souvent, d'enterrer les dossiers brûlants, d'éluder les questions gênantes. Et pourtant, il y avait bien, il y a toujours une vérité vraie. La vérité. S'efforcer d'y atteindre, tel est le but, tel est le seul souci des auteurs dont nous réunissons les ouvrages dans une collection au titre volontairement provocant, titre qui se veut aussi une devise : La vérité Vraie. Vaste ambition, dira-t-on... Sans doute. Mais ambition réalisable quand la rigueur du chercheur, la sagacité du journaliste, la chaleur de l'écrivain, la sincérité de l'homme s'unissent pour aller jusqu'au bout d'un sujet, jusqu'au fond d'un problème. Les difficultés de toute enquête, l'impossibilité parfois d'être vraiment complet, nous entendons d'autant moins les dissimuler que les auteurs les font ici partager à leurs lecteurs. Ensemble ils vont. Ensemble ils avancent. Ensemble ils découvrent. Presque cinq siècles après Christophe Colomb (dont on n'oubliera pas la statue solitaire rencontrée par l'auteur sur une place vide d'un bas quartier de Chicago dont le chômage a fait un désert), c'est tout simplement à redécouvrir l'Amérique qu'Henri Alleg invite ici le lecteur. La redécouvrir en lui enlevant le masque des mythes qui en occultent aussi sûrement la réalité que les échafaudages dissimulent actuellement, dans le port de New York, une statue de la Liberté en réparation. Tenaces et combien trompeurs, ces mythes qu'entretient une incessante propagande sur « le modèle américain ». Pour y regarder de plus près, de très près, c'est en vivant chez l'habitant, chez des travailleurs et des chômeurs, chez des Blancs et des Noirs que, des mois durant, Henri Alleg a parcouru les États-Unis.... Des véritables ruines du Bronx aux marbres du Capitole, d'une Silicon Valley fort dissemblable de sa légende aux banlieues ouvrières de Detroit et Pittsburgh matraquées par les fermetures d'usines, du ranch de « J.-R. » aux mines de cuivre que creusent les « Chicanos » de l'Arizona, de « jogging » en « smurf » et de « clips » en « fast-food », on découvre ainsi que « l'univers impitoya-a-ble » de la chanson du feuilleton n'est pas l'apanage de Dallas. Ne pas être manichéen, dans un monde qui l'est, telle était bien la difficulté de la pénétrante entreprise d'Henri Alleg ; réussissant à nous faire regarder d'un œil neuf ce pays-continent en crise mais aussi en viscérale mutation, il a pleinement réussi à la surmonter. Et c'est, avec S.O.S. AMERICA ! « une autre Amérique » que nous découvrons effectivement. Celle aussi de ceux dont on ne parle guère, celle des syndicalistes non corrompus et des pasteurs généreux, celle des militants des droits civiques et des communistes « made in USA », etc. Aussi bien le moindre paradoxe de ce livre « fascinating » n'est-il pas de nous faire mieux comprendre la France d'aujourd'hui, ce pays où tant de politiciens « branchés » et de « penseurs » à la mode s'efforcent de faire passer pour nouvelles des idées venues tout droit des surplus nord-américains.