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Études chinoises xxxiii-2 (2014)
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Librairie Eyrolles - Paris 5e
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Études chinoises xxxiii-2 (2014)

Études chinoises xxxiii-2 (2014)

Chance, destin et jeux de hasard en chine

Collection Études chinoises

208 pages, parution le 05/09/2015

Résumé

Lisa Raphals, Debates about Fate in Early China
Abstract: Debates on the nature of self, agency, and fate are central to the Chinese philosophical tradition. In some cases, debates about fate overlapped with debates about mantic practices ("divination"). I begin by identifying five major issues of the Chinese debates, with particular interest in their relevance to contemporary philosophical debates about determinism. I then turn to a more detailed account of the arguments about fate ascribed to Confucius, the Mohists, Mencius, Zhuangzi, Xunzi, and Wang Chong. The final section compares their views on fate to those of contemporary philosophers who take a compatibilist position on questions of determinism and free will.

Stéphane Feuillas, Nature et destin dans la pensée de Zhang Zai (1020-1078)
Résumé - Dans la conception philosophique traditionnelle chinoise, les actes bons sont censés être rétribués par des présages fastes ; inversement un mauvais comportement induit mauvaise fortune. Depuis les écrits philosophiques de Mozi ou dans les dialogues consacrés à cette question dans le Mencius, cette formulation constitue le fondement de tout exercice moral et de la culture de soi. Le bénéfice existentiel résultant de la bonne conduite a été sévèrement critiqué par Wang Chong (27-c. 97) dont l'une des pierres de touche de la pensée consiste à couper le lien entre les comportements moraux et la vie effective de l'individu. Nombreux - et largement suffisants pour lui - sont les exemples de comportements moralement fondés qui n'ont pas été payés en retour de joie ou de bonheur, ou qui pire encore, sont sanctionnés négativement. Inversement, l'attitude du brigand Zhi dans le Zhuangzi, voleur, tueur, menteur, parangon de l'homme vicieux, sert de « preuve » à l'absence de lien consubstantiel entre morale et bonne fortune. Ce faisant, Wang Chong introduit les notions de chance, bonne ou mauvaise, et élabore sa propre théorie du fatalisme. Si tout est prévu à l'avance, si chaque homme reçoit d'emblée un « lot destinal » interprétable uniquement en termes de rencontres fortuites, plus aucune fondation n'est possible à la pratique morale autre qu'un intérêt personnel, idiosyncrasique et malheureux, pour la vertu. L'article revient sur ces questions en utilisant la pensée de Zhang Zai, telle qu'il la développe dans la Discipline pour les débutants (Zhengmeng). Il montre comment, selon lui, l'idée de destin doit être construite dans un lien indéfectible à celle de nature humaine, comment le destin évolue proportionnellement au développement des virtualités de sa nature. On mesurera ainsi la place qu'il accorde à la chance dans le mouvement général consistant pour l'homme à « atteindre sa destinée » ou plutôt sa « destination naturelle » (zhi yu ming).

Andrea Bréard, Homo ludens mathematicus La quantification du hasard dans les pratiques combinatoires en Chine
Résumé - Cet article porte sur le rôle des nombres dans les techniques de divination et les jeux de dominos en Chine à partir de la fin des Ming. Même si la quantification du hasard ne figurait pas explicitement parmi les sujets traités dans des textes mathématiques de la période pré-moderne en Chine, on montrera qu'une théorie combinatoire pourrait avoir joué un rôle dans certains schémas de gains et de pertes qui se distinguent clairement de ceux basés sur des considérations numérologiques. Ma contribution donnera d'abord un aperçu chronologique des conceptualisations du hasard par les mathématiques jusqu'à la fin de la période impériale, avant d'analyser, à rebours, les jeux d'un point de vue probabiliste. Même si cette approche peut sembler anachronique, elle permet néanmoins d'identifier les traces d'une mise en relation rationnelle des gains avec les chances d'obtenir une certaine combinaison de dominos et de poser la question de la circulation des savoirs mathématiques dans divers milieux sociaux, où se pratiquaient la divination et les jeux.


Frédéric Constant, La législation sur les jeux d'argent à l'époque des Qing
Résumé - Les jeux d'argent étaient extrêmement répandus dans la société chinoise de l'époque des Qing malgré la rigueur d'un interdit légal réaffirmé avec une grande constance. La prohibition des jeux était ancienne, et on la retrouve posée dès le droit des Tang. Plus que les jeux eux-mêmes, c'est le fait de miser des biens qui était condamné, et le droit déterminait la peine encourue en proportion des sommes engagées. Le législateur des Qing rompit en partie avec ce principe et tenta d'appréhender le jeu au travers de la multitude de ses ramifications sociales : l'ensemble des personnes associées aux jeux d'argent de façon plus ou moins directe étaient ainsi visées par le droit. En s'attaquant à tous ceux qui
fournissaient aux joueurs l'occasion d'assouvir leur vice, les Qing tentèrent de couper les racines du mal. Il n'en résulta qu'une complexification de la législation que l'administration, dépourvue de moyens suffisants, ne réussit jamais à mettre réellement en œuvre.

Xavier Paulès, Les limites de l'influence du modèle de Las Vegas dans l'offre de jeux de hasard à Macao : apports d'une mise en perspective historique
Résumé - La multiplication des gigantesques casinos à thème (Venitian, Galaxy, City of Dreams) à Macao depuis dix ans donne l'impression qu'on est en présence d'une nouvelle Las Vegas. L'arrivée d'opérateurs américains en 2002 a donné une impulsion nouvelle au secteur des jeux de hasard et introduit un « modèle vegasien » qui consiste essentiellement, afin d'élargir au maximum la clientèle fréquentant les casinos, à insérer les jeux de hasard dans une offre beaucoup plus large de divertissements (entertainment). Il reste que certains aspects de l'organisation du jeu à Macao se démarquent nettement du modèle vegasien. Le plus saillant d'entre eux est le règne sans partage du baccara. Cependant, la prédominance de ce jeu d'origine européenne depuis les années 1960 n'a jusqu'à présent jamais été expliquée de façon convaincante. Cet article a pour but de démontrer qu'un retour sur l'histoire des casinos de Macao depuis le milieu du XIXe siècle fournit des éléments décisifs d'explication.
Durant un siècle, à partir des années 1860, les casinos de Macao n'ont, à peu de choses près, proposé qu'un seul jeu à leurs clients : le fantan. Ce jeu purement chinois a donc largement façonné l'habitus des joueurs de l'ancienne colonie portugaise, et même, au-delà, de toute la Chine du Sud. Il est possible de montrer que le baccara, en dépit des apparences, présente des similitudes profondes avec le fantan, ce qui explique pourquoi c'est lui qui s'est imposé parmi tous les jeux européens proposés aux joueurs à partir du début des années 1960.


Stéphanie Homola, Le cas du « dragon chinois » : légende, destin et chance autour d'un jeu divinatoire
Résumé - Le « dragon chinois » (Zhonghua yitiao long ) est un jeu divinatoire contemporain qui se pratique avec des cartes à la manière d'un solitaire. Ce cas soulève tout d'abord la question de la circulation et de la transmission des jeux. On s'intéressera ainsi aux légendes qui accompagnent les jeux ainsi qu'aux conditions de l'enseignement des règles à de nouveaux joueurs. Rituel d'interrogation du
destin ou jeu pour attirer la chance, cet exemple permet également d'examiner les catégories de jeu et de rituel, de mettre en évidence les mécanismes qui les rapprochent et ceux qui les distinguent. On s'interrogera en particulier sur la nature de l'instance qui préside au résultat du jeu, sur l'effet qui est attendu du jeu et sur l'analogie entre la manipulation des cartes et celle du destin. Le cas du « dragon chinois » peut ainsi être utilement confronté aux réflexions théoriques récentes menées par Roberte Hamayon sur les mécanismes fondamentaux des jeux divinatoires ou des rituels pour attirer la chance.

English abstracts

Lisa Raphals: Debates about Fate in Early China
Debates on the nature of self, agency, and fate are central to the Chinese philosophical tradition. In some cases, debates about fate overlapped with debates about mantic practices ("divination"). I begin by identifying five major issues of the Chinese debates, with particular interest in their relevance to contemporary philosophical debates about determinism. I then turn to a more detailed account of
the arguments about fate ascribed to Confucius, the Mohists, Mencius, Zhuangzi, Xunzi, and Wang Chong. The final section compares their views on fate to those of contemporary philosophers who take a compatibilist position on questions of determinism and free will.

Stéphane Feuillas: Human Nature and Destiny in the Thought of Zhang Zai (1020-1078)
In the conception of traditional Chinese philosophy, good deeds are supposed to be rewarded by auspicious omens; conversely, bad behavior brought on bad luck. Beginning with the philosophical writings of Mozi or in the dialogues dedicated to this question in Mencius, this formulation constitutes the foundation of all moral practice and self-cultivation. The existential benefit resulting from good conduct was severely criticized by Wang Chong (ca. 27-97 CE), who took as one of the touchstones of his thought the severing of the link between moral behavior and the effective life of the individual. Many - and generally sufficient for him - were the examples of morally behavior based was not repaid in turn by joy or happiness, or even worse, were adversely punished. Conversely, the attitude of the bandit Zhi in the Zhuangzi - a thief, murderer, liar, and paragon of an evil man - serves as a "proof" of the absence of a commensurate link between morality and good fortune. In so doing, Wang Chong introduced the concepts of chance, good or bad, and developed his own theory of fatalism. If everything is predetermined in advance, if each man receives from the outset a "measure of fate" understandable solely in terms of chance meetings, no other foundation is possible for virtue in moral practice other than idiosyncratic and unfortunate self-interest.
This article turns to these issues through the thought of Zhang Zai, as he developed it in the Correct Discipline for Youth (Zhengmeng). It shows how, according to him, the idea of destiny should be constructed in a unbreakable bond to that of human nature, and how fate changes proportionally according to the development of the potentialities of that nature. Thus, it measures the place given to luck in the
general movement consisting for man of "reaching his destiny" or rather his "natural destiny" (zhi yu ming).

Andrea Bréard: Homo ludens mathematicus: The Quantification of Chance in Combinatorial Practices in China.
This article focuses on the role of numbers in divination techniques and the game of dominoes in China starting from the late Ming.
Even if the quantification of chance was not explicitly included among the subjects covered in mathematical texts of the pre-modern period in China, we will show that combinatorial theory may have played a role in certain patterns of gains and losses that stand out clearly from those based on numerological considerations. An overview of conceptualizations of chance by combinatorial mathematics up until the end of the imperial period reveals the theoretical importance of gaming and divination for mathematical considerations. Inversely, we can conjecture about the role that these mathematical theories might have played when looking at late imperial practices of chance from a modern probabilistic point of view. While this approach may seem anachronistic, it nevertheless allows us to identify traces of a
rational linking of winning with the chance of getting a certain combination of dominoes as well as to pose the question of the circulation of mathematical knowledge in various social settings where divination and games were practiced.

Frédéric Constant: The Legislation of Gambling in the Qing Dynasty
Gambling was extremely prevalent in Chinese society in the Qing period despite the strictures of a legal prohibition that were constantly reaffirmed. The prohibition of gambling was an ancient practice, one which first appears in Tang-dynasty law. More than the games themselves, it was the fact that property was wagered that was condemned, and the law determined the penalty in proportion to the sums involved. Qing legislation broke in part from this principle and tried to approach gambling through the multitude of its social ramifications: All persons associated more or less directly with gambling were thus covered by the law. By addressing all those providing gamblers the opportunity to indulge their vice, the Qing tried to cut off the roots of this evil. This resulted only in a the growing complexity of legislation which the administration, without sufficient means, never actually managed to implement.

Xavier Paulès: The limits of the Influence of the Las Vegas Model in Gambling in Macao: Approaches from a Historical Perspective
The proliferation of giant theme casinos (the Venetian, Galaxy, City of Dreams) in Macao in the last ten years gives the impression that we are in the presence of a new Las Vegas. The arrival of American operators in 2002 gave a new impetus to the gambling sector and introduced a "Vegas model," which, in order to expand to the maximum the number of customers frequenting the casino, essentially
consists of including gambling in a much broader range of entertainments. However, certain aspects of the organization of gambling in Macao are distinctly different from the Vegas model. The most prominent of these is the unchallenged dominance of baccarat. However, the prevalence of this game of European origin since the 1960s has so far never been explained convincingly. This article aims to show that a reexamination of the history of Macao casinos since the mid-19th century provides key elements for an explanation. For a century starting in the 1860s, Macao casinos had, with few exceptions, offered only one game to their clients: fan-tan. This purely Chinese game had largely shaped the habits of players in the former Portuguese colony and even beyond, throughout all of South China. It is possible to show that baccarat, despite appearances, has profound similarities to fan-tan, which is why it is this game that has dominated among all European games available to players since the early 1960s.

Stéphanie Homola: The Case of "Chinese dragon": Legend, Destiny and Luck in a Divination Game
"Chinese Dragon" (Zhonghua yitiao long ) is a contemporary divination game that is played with cards, like solitaire. This raises first the question of the circulation and transmission of games. It is thus of interest to trace the legends that accompany the game and the circumstances of teaching the rules to new players. As a ritual for divining fate or a game to bring good luck, this example also allows
us to review the categories of game and ritual and to highlight the mechanisms that both unite and separate them. In particular, this paper examines the nature of the proceedings that govern the outcome of the game, the expected effect of the game, and the analogy between the manipulation of the cards and that of fate. The case of "Chinese dragon" can be effectively examined in light of the recent theoretical
reflections of Roberte Hamayon on the fundamental mechanisms of divination games or rituals to bring good luck.



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Sommaire

Éditorial
In memoriam Jean-Pierre Diény

Dossier
Chance, destin et jeux de hasard en Chine

ARTICLES
Lisa RAPHALS : Debates about Fate in Early China
Stéphane FEUILLAS : Nature et destin dans la pensée de  Zhang Zai (1020-1078)
Andrea BREARD : Homo ludens mathematicus. La quantification du hasard dans les pratiques combinatoires en Chine
Frédéric CONSTANT : La législation sur les jeux d'argent à l'époque des Qing
Xavier PAULES : Les limites de l'influence du modèle de Las Vegas dans l'offre de jeux de hasard à Macao : apports  d'une mise en perspective historique
Stéphanie HOMOLA : Le cas du « dragon chinois » : légende, destin et chance autour d'un jeu divinatoire

COMPTES RENDUS
Isabelle Thireau (dir.), De proche en proche. Ethnographie des formes d'association en Chine contemporaine  (Judith Audin)• Marie-Claire Bergère, Chine, le nouveau capitalisme d'État (Delphine Spicq)• Shana J. Brown, Pastimes: From Art and Antiquarianism to Modern Chinese Historiography (Richard Schneider)• Hans Harder, Barbara Mittler (dir.), Asian Punches: A Transcultural Affair (Marie Laureillard)• Matthias Richter, The Embodied Text: Establishing Textual Identity in Early Chinese Manuscripts (Olivier Venture)• Morten Schlütter, Stephen F. Teiser (dir.), Readings of the Platform Sūtra (Costantino Moretti)• Richard J. Smith, The I Ching: A Biography (Stéphanie Homola)• Daniel F. Vukovich, China and Orientalism: Western Knowledge Production and the P.R.C. (Florent Villard).

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Caractéristiques techniques

  PAPIER
Éditeur(s) Klincksieck
Collection Études chinoises
Parution 05/09/2015
Nb. de pages 208
Format 15 x 21
Couverture Broché
Poids 276g
EAN13 9782252039410

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