Résumé
Qu'un universitaire ose rassembler dans un ouvrage, si modeste fut-il, des articles publiés dans des journaux, voilà, n'en doutons pas, de quoi jeter l'émoi chez certains collègues dont on devine les cris d'orfraie ! C'est déjà là une bonne raison de le faire, puisqu'en tout pédagogue, il y a un « provocateur » qui sommeille. Que l'universitaire ait aussi pour mission de commenter la vie politique, aux côtés du journaliste professionnel, avec son langage, son style et sa liberté de ton naturelle, est une évidence. Réactions immédiates à des événements trop vite dépassés par l'actualité, les articles politiques relèvent, à l'évidence, de ce monde fort bien décrit par Gilles Lipovetski, et qui est celui de l'éphémère. Il ne faudrait, sous aucun prétexte, que la publication de ces quelques articles, apparaisse d'une certaine façon comme une rétro-justification : « je vous l'avais dit ; je l'avais écrit... ». Dieu nous garde d'avoir voulu jouer au « Devins et si, parfois, il est arrivé que nos analyses aient été vérifiées, c'est, sans doute, que la science politique, comme toute science et malgré ses faiblesses, peut aussi aider à comprendre et prévoir l'avenir. Ceci dit, ne peut-on tenter de découvrir des éléments de cohérence dans cette vingtaine d'articles qui, tous, de près ou de loin, traitent de la cohabitation au jour le jour ? Avouons, et cet aveu ne nous coûte guère, une certaine faiblesse pour ce phénomène qui est loin d'être unique monde, même si, chez nous, il apparaît avec plus de clarté. Nous y avons vu, depuis le début, une grande chance pour nos institutions et, plus encore, pour la démocratie. C'est grâce à elle, tout d'abord, que, pour la première fois depuis ses origines, la Constitution de 1958 a pu être enfin appliquée dans sa totalité ,en respectant ce qui correspond à sa nature profonde, à savoir d'être de type parlementaire. Ensuite, la cohabitation a permis, à l'évidence, un approfondissement de la démocratie, car si la notion de « consensus » peut en gêner certains, et si l'idée de rassembler « deux Français sur trois » apparaît peu réaliste, ce système surprenant, imposé par les faits, a contribué, en associant la droite et la gauche au pouvoir, à valoriser, paradoxalement peut-être, l'idée d'opposition. L'alternance de 1981 avait déjà valorisé l'opposition, en montrant qu'elle était, naturellement, le gouvernement potentiel de « demain ». La cohabitation l'a fait également, en prouvant que l'opposition était, aussi, une partie du Pouvoir « d'aujourd'hui ».