Résumé
Ce qui n’a pas changé depuis 1945 c’est l’enfermement. Entrer en prison, c’est être confronté aux bruits, aux odeurs, à l’humiliation des fouilles, la promiscuité. Perdre son identité pour devenir un numéro d’écrou ou un porte-clefs. Le choc carcéral, la perte des repères usuels sont ressentis, tant par les détenus que par les surveillants. Pourtant la réalité des prisons françaises a profondément changé au cours des soixante dernières années. Le recul de l’arbitraire et l’humanisation progressive des conditions de détention sont indéniables. A la Libération, une réforme humaniste initiée par des résistants et des déportés qui avaient connu les prisons de Vichy, tente de promouvoir la réhabilitation progressive du détenu. Mais ils ne parviennent pas à bouleverser l’archaïsme de l’institution, ni à remédier à la vétusté des prisons. Après la gestion difficile des épurés, les prisons des débuts de la Ve République doivent affronter le flot de détenus politiques, militants de l’indépendance algérienne. Mais ce sont les révoltes des années soixante-dix, portées par le souffle de 1968, qui vont lancer le mouvement de conquête de nouveaux droits pour les détenus. Et la transformation profonde de la condition pénitentiaire au cours des années 1980 s’effectue après que la privation de liberté, soit devenue la peine suprême. Et depuis le début du XXIe siècle, on assiste à la répétition des mêmes indignations, des mêmes stéréotypes, multiplication des rapports et enquêtes, Mutins sur les toits, surveillants bloquant les portes, récidive catastrophique ou détention provisoire abusive, impunité et injustice, à l’heure où une nouvelle loi pénitentiaire est en discussion, la prison se retrouve au cœur de contradictions intenables. Outil d’amendement et de réinsertion, rempart contre la récidive, elle se révèle criminogène, déshumanisante et désocialisante, elle est confrontée à une incarcération de masse qui sert à justifier la construction de nouvelles places… De quelles histoires nos prisons sont-elles le produit ? Peuvent-elles échapper à leur fonction de relégation ?, Peuvent-elles s’inscrire dans un horizon de reconstruction du lien social et des personnes ? Quel sens donné à la peine pour qu’elle soit autre chose qu’un châtiment. ? Nourri de très nombreux témoignages et documents cet ouvrage traite des multiples aspects de la vie carcérale pour comprendre la politique pénitentiaire, il se lit d’une traite.