Résumé
Dans les dix-sept esquisses dramatiques du Théâtre de chambre, Tardieu avait, en quelque sorte, cerné de pointillés le renouvellement des formes scéniques et du langage théâtral, tel qu'il l'avait lui-même pressenti et amorcé vingt ans auparavant. Farces, parodies, poèmes ou cauchemars, ces brèves pièces, sous un aspect à la fois étrange et presque enfantin, allaient plus loin qu'il n'avait paru tout d'abord. Les théâtres de recherche et les troupes de jeunes ne s'y sont pas trompés qui, de plus en plus nombreux, traduisent et jouent ses oeuvres dans le monde entier. Un peu plus tard, si Tardieu intitulait le deuxième volume de son Théâtre : Poèmes à jouer, c'est qu'à la faveur de l'"alibi" poétique, il faisait un pas de plus sur sa propre lancée, surtout dans L'ABC de notre vie, Rythmes à trois temps, Une voix sans personne : des "arguments", des "thèmes" (mais non des "sujets") diversement associés se substituaient de plus en plus aux événements, à la "trame", à l'"intrigue". Ce n'était pas là seulement, de sa part, une volonté d'abstraction, mais plutôt la poursuite d'une nouvelle sorte de structure, non moins stricte et non moins exigeante que celle du théâtre traditionnel. La présente réédition des Poèmes à jouer a été revue et augmentée de pièces de même venue (mais d'inégale longueur). On y trouve un court monologue qui est, en fait, un "crescendo" vocal : Malédictions d'une furie, un oratorio lyrique dont le thème central est la dialectique entre l'immobilité et la mobilité : Des arbres et des hommes, enfin un dialogue : Trois personnes entrées dans les tableaux, où, comme dans ses Portes de toile, Jean Tardieu cherche à évoquer l'univers poétique de trois grands peintres d'aujourd'hui, aussi différents que possible : Braque, Chagall, Miró.