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Le premier homme de ma vie onze femmes racontent leur père
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Librairie Eyrolles - Paris 5e
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Le premier homme de ma vie onze femmes racontent leur père

Le premier homme de ma vie onze femmes racontent leur père

Olivia Benhamou

236 pages, parution le 13/03/2008

Résumé

Des femmes d'exception évoquent la figure paternelle. Autoportraits en creux ou en ombre chinoise : en brossant le portrait de leurs pères, elles dessinent aussi le leur.

Le premier homme de ma vie ? Mon père ! De cet homme, il faut pouvoir se délivrer. Non pas en le tuant, mais en lui attribuant sa juste place.
Olivia Benhamou s'est entretenue avec onze femmes célèbres ou de père célèbre, qui ont pour points communs leur forte personnalité, leur engagement, leur détermination : Michèle Bernier, Mâkhi Xenakis, Héloïse d'Ormesson, Francine Deroudille (fille de Robert Doisneau), Anne Goscinny, Françoise Héritier, Valérie Laurent-Pavlovsky, Camille Laurens, Roselyne Bachelot, Malka Braun, Brigitte Lahaie.
Par la pertinence de ses questions et la finesse de son analyse, Olivia Benhamou explore avec talent cette relation si particulière. L'auteur a su instaurer un climat de grande confiance : pas une de ses interlocutrices qui ne se soit mise à nu. Sans tabou ni complexe, dans les rires ou dans les pleurs, toutes ont livré un témoignage unique et émouvant sur leur père ? qu'il fût papa poule ou père fouettard.




L'auteur - Olivia Benhamou

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Sommaire

(Michelle Bernier - Extraits) Quel était le mode de vie de la famille Bernier ?
Quand je suis née, mes parents vendaient tous les deux des journaux dans la rue. J'ai l'impression de ne pas les avoir vus beaucoup : ils passaient de temps en temps, m'embrassaient goulûment, et repartaient aussi vite. J'ai eu beaucoup de nounous différentes parce qu'il n'y avait pas de grand-mère à Paris. Je me souviens de l'une d'entre elles, qui me trouvait trop sage, m'avait donné une fessée à cause de ça. C'est vrai, j'étais gentille, très calme, je ne faisais pas de bêtises. On me disait : " Assieds-toi là ", je m'asseyais, je n'allais jamais braver les interdits. Quand j'ai raconté l'histoire de la fessée à mes parents, ils l'ont virée manu militari et ensuite j'ai décidé que je ne voulais plus personne pour me garder. Pendant presque un an, je suis restée toute seule. Hara-Kiri avait commencé à cette époque. Souvent le soir, je me couchais dans le lit de mes parents en les attendant, pour être sûre de les voir quand ils rentreraient. Et, à leur retour, ils me trouvaient endormie, à poings fermés, mon père me portait dans mon lit. À chaque fois, ma mère disait : " M'enfin quand même, on va pas la porter comme ça jusqu'à vingt ans ! ", et mon père répondait : " Mais laisse-là, tu verras quand elle partira comme on va la regretter. " Il avait un côté gentil, attendri envers moi. Et puis il avait ramené d'Indochine une passion pour la cuisine vietnamienne : sa joie, c'était de faire à manger pour nous, et plus tard pour mes propres enfants : " Hé, les enfants, ça vous dirait pas des bons macaronis au gratin ? ", il y passait des heures. Il aimait nous voir nous régaler, il était attentif au plaisir qu'il pouvait nous donner. Je crois qu'il avait besoin de se préserver ces petites bulles de détente et de bien-être pour pouvoir supporter la vie trépidante qu'il menait par ailleurs.

Dans votre enfance, la solitude domine. Ne vous a-t-elle pas trop pesée ?
Quand j'en avais marre d'être toute seule, la concierge appelait un taxi pour moi. Je montais tranquillement dans le taxi et je disais : " 4 rue Choron dans le 9e, s'il vous plaît. " Comme je devais avoir environ six ans, les chauffeurs de taxi croyaient toujours qu'un adulte allait arriver... et pas du tout. Ils me disaient, effarés : " T'es toute seule ? ", et moi je sortais tranquillement mon billet de cinq francs de la poche, et je payais. Je rejoignais mes parents et je restais avec eux. C'est comme ça que j'ai vu l'ambiance au bureau, les vendeurs du journal qui rentraient de leur tournée... Et j'ai participé aux fêtes : tous les samedis soir pour clôre la semaine de vente dans la rue, il y avait un orchestre qui venait. Et j'allais en boîte de nuit avec mes parents, je dormais sur les fauteuils. Mais ce n'était pas comme ça toutes les semaines.
J'était très liée avec ma mère, qui essayait de rentrer un peu plus tôt le soir : on restait souvent toutes les deux, on partageait notre solitude sans lui, quand il rentrait tard... On était extrêmement complices. Ce n'étaient pas des parents copains, on était juste heureux d'être ensemble. Mais à onze ans, j'ai demandé à partir en pension, sans doute pour rompre cette solitude. Ils ne m'ont jamais rien refusé, mais cette demande a été un choc.

[...]

Quel couple professionnel et amoureux formaient vos parents ?
Ils s'étaient trouvés. Maman travaillait avec papa, elle s'occupait de tout l'administratif : les abonnements, le téléphone, la gestion quotidienne... Elle lui facilitait la vie pour qu'il puisse faire son boulot. Ils ont toujours bossé ensemble, ils s'étaient rencontrés en vendant des journaux dans la rue. Malgré tout ce que pouvaient entraîner les excès, l'alcool, la folie, la passion, la jeunesse, c'était un couple très uni. Quand je voyais des choses que je n'avais pas envie de voir, je baissais la tête. Ce que je retiens, c'est que, même lorsqu'il y avait des difficultés, ils se parlaient bien. Je crois qu'ils étaient sexuellement heureux, et très amoureux. Ils sont restés ensemble trente-huit ans.

Quand avez-vous compris de quoi il était question dansHara Kiri ?
Attention, je n'étais pas en pâture au milieu d'un tas de dingues ! On m'a beaucoup protégée, je ne voyais pas trop ce qu'ils faisaient. J'ai participé à un ou deux romans photo pour le journal, quand ils avaient besoin d'une petite fille, mais c'était archisoft : du style Cosette, écrit par Topor, Cavanna y jouait un personnage, ce n'était pas du tout sulfureux.
C'est à l'adolescence que je me suis rendue compte de ce qu'étaient Hara Kiri puis Charlie Hebdo. Notamment parce que, au collège, il y a eu toute une période où l'on m'a détestée. Il faut dire que ce que faisait mon père ne se faisait pas, il avait une image publique très forte, et j'avais des amis dont les parents disaient : " Je ne veux pas que tu fréquentes cette fille. " Je ne comprenais pas cette mise à l'écart. Ce que disait ou faisait mon père, pour moi ce n'était ni bien ni mal... J'aurais été incapable de porter un jugement moral. Et je l'ai toujours défendu, même quand parfois j'ai trouvé qu'il allait loin, qu'il n'était pas gentil avec certaines personnes... mais je savais que l'alcool y était pour beaucoup. Je me souviens de moments où je ne savais plus où me mettre, je ne faisais plus qu'un avec lui. Par exemple quand il faisait des émissions de télé et qu'il partait en vrille : je le regardais et je me disais : " Ça y est, il ne se contrôle plus, il a dit la phrase de trop, comment on va rattraper ça, demain je vais en entendre parler... " Quand il se contrôlait, je le trouvais brillant, intelligent, drôle. Et quand je voyais les gens hurler après lui, je le considérais toujours comme un incompris.

Avez-vous souffert de son côté provocateur ?
À un moment, il a chanté à l'Olympia, en première partie du groupe Odeurs de Ramon Pipin ? un groupe qui s'appelait avant Au bonheur des dames. Moi, j'étais sa groupie, je l'ai suivi partout pendant sa tournée. Quand les gens le sifflaient, le huaient, ne comprenaient pas ce qu'il faisait, ça me rendait hystérique. Je n'arrêtais pas de leur dire de se taire, de le laisser tranquille. Au fond, j'ai protégé mon père, je connaissais ses débordements et ses délires, car je comprenais bien d'où venait son agressivité et son indignation permanentes. J'ai toujours pensé qu'on ne peut pas s'occuper du monde, je veux dire de l'humanité ? comme lui l'a fait ou comme Raiser ou Cavanna l'ont fait ? sans l'aimer. Autrement, on n'emmerde pas les gens pour qu'ils deviennent plus intelligents, on les laisse tranquilles ! Or, chez mon père et ses copains, il n'y avait aucune envie de faire carrière, ni de se dorer le blason, ni de passer à la postérité : ils avaient juste envie de faire bouger les choses, les esprits, les mentalités, et je pense qu'il faut être généreux pour faire ça.

Parfois c'est allé un peu trop loin...
On est bien d'accord, c'est clair, mais avant de faire comprendre ça, c'est long et difficile. Les gens que je croise aujourd'hui qui l'ont connu, qui l'ont souvent méprisé ou détesté, les mêmes qui ne lui auraient pas tendu un demi-orteil pour le sortir de la merde, viennent me dire aujourd'hui : " Ah, votre papa, je l'adorais, c'était quelqu'un ! " Alors je ne réponds pas parce que je ne suis pas comme mon père. Lui aurait répondu : " Va te faire foutre, crève ! " Je le sais et en même temps je me dis que c'est bien, qu'ils viennent faire amende honorable : et c'est pour moi qu'ils le font.

Avez-vous le sentiment qu'il était fragile ?
Je crois que mon père était un grand sentimental : il se faisait beaucoup de soucis, c'était un homme angoissé, et en même temps il était une sorte de dictateur, il fallait toujours qu'on pense comme lui. Moi, j'avais un peu plus de chance, j'avais un peu le droit de penser autrement. Mais c'était difficile d'exister à côté de lui. D'ailleurs, jusqu'à sa mort, son avis restait primordial. Je pense que si je m'en suis sortie face à lui, c'est parce que j'ai réussi à garder mon intégrité de femme et d'adulte : je faisais quand même ce que je voulais. Et il m'y a aidée aussi car il ne m'a jamais critiquée. Ou alors, quand il me critiquait, c'était longtemps après, quand c'était fini, du style : " J'ai moins aimé quand tu as fait ça, mais bon... " Mais si je lui avais dit : " Je vais faire des claquettes avec un unijambiste ", il m'aurait dit : " C'est formidable ! " Je pouvais dire, faire n'importe quoi, c'était formidable. Il est venu me voir à tous mes spectacles, absolument tous.


A t-il été pour vous un moteur professionnel ?
Le fait d'être " la fille de " donne sûrement l'envie d'épater ses parents, j'avais envie de l'impressionner. En plus, il m'a encouragée dans cette voie, en me répétant : " Peu importe ce que tu feras dans la vie, mais ne suis jamais personne, sois toujours celle qui entraîne, sois toujours devant, quoi que tu fasses ! " Après 1968, à l'âge de quatorze, quinze ans, on était tous révoltés, et je disais : " Un jour, j'irai travailler à l'usine. " Il me répondait : " Oui, tu iras travailler à l'usine mais alors tu rentreras au syndicat. Et tu deviendras chef du syndicat, c'est comme ça qu'on fait avancer les choses, tu ne seras jamais un mouton ! " Et chaque fois que je parlais de projets professionnels, il me tenait le même discours. Ça, c'était lourd à porter, car ça plaçait la barre très haut.

[...]

Avez-vous le sentiment d'avoir choisi des hommes qui ressemblaient à votre papa ?
Bruno Gaccio c'est évident, le côté contestataire, peur de rien, voyou, grande gueule... Quand je l'ai vu, j'ai eu un truc au cœur... ça s'appelle un coup de foudre, je crois. [...] Avec Bruno, ils se sont entendus à merveille parce qu'ils n'étaient pas loin l'un de l'autre. On les posait à côté et ça partait au quart de tour, c'était génial d'ailleurs. Bruno et papa avaient beaucoup de points communs, il y avait aussi un peu le côté " maître qui apprend à l'élève ". Je pense que Bruno lui faisait penser à lui, entièrement autodidacte, l'homme qui se fait tout seul, et qui ne peut pas s'empêcher de l'ouvrir.
[ ...] Moi, je ne fais jamais les choses dans l'aboiement. Je ne sais pas le faire, c'est quelque chose qui m'effraie.

Est-ce une manière de faire que vous avez adoptée par rapport à votre père ?
Évidemment, parce que j'ai trop vu ce que donnent les conflits. Ils sont rarement à l'avantage de celui qui aboie. Celui qui reste calme a le droit de changer d'avis. Mais pour celui qui a ouvert sa gueule, c'est trop tard et c'est tant pis pour lui. Je suis plutôt comme ma mère dans ce genre de situation. Mon père, lui, voulait toujours avoir raison. Bien sûr que c'est très agréable d'avoir raison, mais chez moi ça n'est pas une obsession, alors que chez mon père ça l'était. Mais cela correspond chez lui à une souffrance que je n'ai pas connue.

Vous voulez dire que votre père avait souffert dans son passé ?
Mon père a perdu son propre père à l'âge de onze ans, et sa mère, qui était garde-barrière dans un petit village de l'Est de la France, a élevé ses trois enfants toute seule. Il était très brillant, mais il a été obligé de quitter l'école pour aller travailler car il était impossible pour sa mère de lui payer des études. Donc, très jeune, il a été rejeté, et empêché dans ses désirs. Je pense que c'est de cette immense frustration vécue dans l'enfance qu'il a tiré son envie invincible de surmonter les obstacles, du style : " J'y arriverai quand même. " Il a travaillé dans une fromagerie, ensuite il est devenu maçon. Et il ne pensait qu'à une chose : se barrer de son village. Et il a suivi un maçon qui faisait du compagnonnage en s'arrêtant là où il y avait des chantiers : il a découvert la France, les filles... Il était super beau, c'était un flambeur, un séducteur et il s'est retrouvé un jour à dix-sept ans, à Perpignan, sans un rond, plus rien. Il a vendu son blouson à quelqu'un dans la rue. Et à l'époque, il y avait des affiches qui fleurissaient dans toute la France : " Voyez du pays, engagez-vous dans l'armée, partez en Indochine. " Il a vu ça, il s'est dit : " L'Indochine ? bien sûr ! " Comme il était mineur, il avait besoin d'une autorisation spéciale de sa mère. Il lui a envoyé un message : " J'ai besoin que tu signes un papier. " Elle a signé et il s'est barré en Indo comme ça. Là-bas, il a été parachutiste, réparateur de radio... Il y est resté trois ans, il était très amoureux d'une Vietnamienne. Il voulait se marier et passer dans l'autre camp parce qu'il savait qu'en passant du côté des Vietminh il aurait troqué son grade de caporal contre celui de colonel... Donc lui, évidemment, ça le tentait ! Mais il a été blessé et, comme il aimait beaucoup sa mère, il a décidé de rentrer pour la revoir. Tout de suite après, il est parti à Paris. À son arrivée, il est tombé sur une petite annonce dans le journal : " Gagnez 50 F / jour, rendez-vous métro Bonne-Nouvelle ". Il y a vu un signe. C'était pour vendre des journaux dans la rue. Au bout de quinze jours, mon père a séduit son patron, il est devenu directeur des ventes, et il s'est acheté une voiture américaine. Au même moment, ma mère est montée de sa province, elle n'avait rien. Elle était femme de ménage dans une famille très bourgeoise et elle avait eu le malheur de boire son petit-déjeuner dans un bol qui ne lui était pas attribué : elle a été mise dehors, elle est restée une semaine sans boire ni manger ? on se croirait dans Zola quand on raconte ça ?, c'est comme ça qu'elle est montée à Paris. Ils se sont rencontrés car elle avait lu la même annonce que lui...
Finalement, la vie de mon père, c'est l'histoire d'une revanche. Une revanche sur la frustration qu'il a vécue, petit, quand on lui a dit : " Tu n'auras pas d'avenir, tu n'y auras pas droit, ton intelligence, ta facilité d'apprendre, on ne va pas s'en servir ! "
Je suis impressionnée par tout ce qu'il a vécu, mais finalement c'est un peu le hasard s'il est arrivé dans la presse. Peut-être qu'il aurait pu devenir chef d'entreprise en maçonnerie aussi. Je crois qu'il en voulait et qu'il avait une âme de malfrat, parce qu'il fallait être un peu brigand pour s'en sortir. Le brigand casse les règles, ne rentre pas dans le moule. C'est pour ça qu'il est ensuite devenu comédien, qu'il a écrit des chansons. Et il adorait ça, les disques, la scène.

[...]

Quelles que soient mes difficultés, je suis persuadée d'avoir eu un père exceptionnel et bon. Parce que les pères très présents, qui sont là tout le temps, en vacances, à la sortie de l'école, qui font faire les devoirs et tout, entre nous, ça doit être super chiant !


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Caractéristiques techniques

  PAPIER NUMERIQUE
Éditeur(s) Robert Laffont
Auteur(s) Olivia Benhamou
Parution 13/03/2008 30/09/2010
Nb. de pages 236 -
Format 13.8 x 21.7 -
Couverture Broché -
Poids 298g -
Contenu - PDF
ePub
EAN13 9782221107942 9782221112434
9782221122266

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