Le long des trottoirs

Dans l'opulente demeure de l'affairiste Dupré, Hélène, sa fille aînée, ne peut oublier les années de misère qu'elle connut étant enfant. Aussi, a-t-elle consacré sa vie à un apostolat de charité, qui, en qualité d'assistante sociale, la mène - nuit et jour - dans les antres de la misère, mettant à contribution, pour la soulager, la fortune paternelle et la science de son fiancé André, jeune et beau médecin du dispensaire de l'usine paternelle. Celui-ci, cependant, aimerait avoir davantage sa fiancé près de lui. Car, sans cesse appelée vers quelque nouvelle détresse, il arrive souvent à Hélène de remettre leur rendez-vous et de le laisser seul. Un jour, l'assistante sociale assiste à la mort d'une vieille femme, et émue par la détresse de sa petite-fille Christine, restée orpheline, la ramène dans sa famille, afin qu'elle puisse y attendre en sécurité un abri et un travail. La jeune Christine est quelque peu déroutée par cette famille hurluberlue qui, outre Dupré et Hélène, comprend Sabine la femme très mondaine et égoïste de Dupré, et leurs deux enfants, spécimens ultra-modernes d'une jeunesse trop gâtée : Marie-Claire et Jean-Pierre. Le jeune collégien est tout de suite obsédé par l'idée de séduire la ravissante orpheline sans défense. Car celle-ci n'a, en effet, pour tout bagage, que sa beauté et son immense désir de se rendre utile par gratitude envers Hélène. Un soir qu'ils sont seuls, Jean-Pierre fait boire Christine, puis il se rend dans la chambre de la jeune fille sous le prétexte qu'il est malade. Celle-ci déjà couchée, trompée par son mensonge, le reçoit en tenue légère. Jean-Pierre cherche alors à abuser d'elle et Sabine Dupré les surprend. Heureuse de cette occasion de se débarrasser de l'orpheline qu'elle déteste, elle n'écoute aucune explication, feint de la croire coupable et la chasse. Une machination habile lui laisse croire que son amie Hélène, déçue par sa conduite est d'accord pour qu'elle parte, et refuse de la voir. Christine abandonnée de tous, sans argent, n'a d'autre ressource que de retourner vers les lieux où s'est déroulée son enfance. Elle y rencontre quelques filles de grand cœur, mais de petite vertue, et tombe entre les mains de leur souteneur Roger, jeune crapule, qui par d'habiles manœuvres, réussit à attirer la jeune fille dans un traquenard et la livre d'abord aux occupations d'entraîneuse, puis à celles de prostituée. Peu à peu, Christine descend la pente et n'oppose plus de réaction au vice. Hélène, cependant, n'a eu de cesse qu'elle n'ait retrouvé sa protégée. Avec l'aide d'une prostituée, Monique, elle y parvient. Monique paiera cette aide de sa vie, car Roger simulera un accident pour l'écraser. Christine, comprenant ses fautes, acceptera qu'Hélène la confie à une maison de réadaptation puis, ensuite, travaillera comme secrétaire auprès d'André. En secret, elle s'éprend de lui. Cet amour achève de la réhabiliter et, pour mériter son estime, elle passe ses nuits à étudier, afin de pouvoir devenir infirmière. Un soir que le médecin a été, une fois de plus, délaissé par Hélène, appelée auprès de Monique mourante, André découragé par sa solitude, invite Christine à dîner. Celle-ci lui propose alors de faire ce dîner chez lui, plutôt que d'aller au restaurant. Amusé et joyeux, André découvre ce qui se cache dans l'âme de Christine qui lui avoue que, devant lui seul, elle n'a plus honte de son passé. Mais Hélène les surprend dans leur tendre tête-à-tête. Écœurée de constater que tout ce qu'elle a fait n'a abouti qu'à être trompée par cette fille qu'elle a sauvée du trottoir, elle lui crie ce qu'elle pense d'elle et déclare à André qu'elle va renoncer cette fois à s'occuper des déshérités, car ils n'en valent pas la peine. Christine, réalisant la situation, se sauve affolée. Ne pouvant plus renoncer à son amour, elle va se jeter dans la Seine. Elle est sauvée à temps, ramenée au dispensaire de l'usine et soignée par André. Celui-ci comprend que son bonheur n'est pas auprès d'Hélène, que sa passion de servir les autres retranchera toujours d'un total amour pour un seul, mais auprès de Christine, qui a su surmonter son destin pour mériter son estime. Hélène alors se sacrifie. Dominant sa douleur, elle comprend que sa véritable vocation est, malgré les déceptions, l'amour de tous les déshérités de la vie. Et elle repart, seule, grandie par sa souffrance, vers la cité pleine des misères, que soulagera toujours son cœur resté charitable.