Résumé
Le 22 juin 1940, après l'armistice franco-allemand de Rethondes, Hitler confie à Gœring : « Notre pacte de non-agression avec Staline était fait pour une guerre longue. La guerre a été courte. Je n'en ai plus besoin. » Trois mois plus tard, alors que la Luftwaffe s'essouffle dans la bataille d'Angleterre, que Raeder démontre qu'un débarquement en Grande-Bretagne est impossible, le général Paulus est chargé de préparer le plan Barbarossa destiné à anéantir les forces militaires soviétiques. Hitler a toujours pensé que seul l'Est pouvait lui fournir les vastes territoires dont il avait besoin pour mettre en œuvre sa politique d'« espace vital » : « Nous devons, comme l'Angleterre, nous constituer un Empire. C'est possible en quelques semaines. » Mais pour Hitler, envahir la Russie, cela ne veut pas dire seulement bousculer et détruire l'Armée Rouge, comme le croient ses officiers d'état-major et les chancelleries. Cela veut dire effacer sur l'ensemble du territoire conquis toute résistance présente et future au National-Socialisme. Pour être plus précis, seront exterminés tous les fonctionnaires politiques, les juifs, les tsiganes, les asiates inférieurs, tous ceux qui pourraient être une charge pour les vainqueurs : aliénés, inaptes au travail, prisonniers et, surtout, les femmes et les enfants des massacrés, car ceux-ci pourraient un jour décider de venger leurs parents. Quant aux autres, les survivants, ils seront du matériel d'esclavage au service des colons ou de l'industrie du Reich. Paradoxalement, pour diriger la nouvelle « colonie », le Führer choisit Alfred Rosenberg, l'apôtre de la renaissance des nationalismes de cette mosaïque de peuples qui composent l'U.R.S.S. Rosenberg, pour le peuple allemand et les observateurs étrangers (comme Frank en Pologne), sera le représentant croupion, le « fauteuil ». Au-dessous de lui, les « assassins » d'Heinrich Himmler se chargeront des basses besognes, sans avoir de comptes à rendre à d'autre autorité que leur Reichsführer. Rosenberg pour l'Union soviétique, Frank pour la Pologne, accepteront en protestant du bout des lèvres cette position impossible, mais ils l'accepteront en connaissant parfaitement les règles du jeu et ses conséquences criminelles. Mieux encore, ces crimes, ils les couvriront par devoir, par fidélité à Hitler et à son idéologie, par faiblesse. Keitel, maréchal et haut responsable du commandement militaire, adoptera la même attitude. Et quand il prendra conscience de sa réelle culpabilité, qu'il décidera de sauver « l'honneur des soldats perdus », Gœring, de sa cellule de Nüremberg, lui ordonnera de se taire. Et il se taira. Quant à Paulus, qui aurait pu, en ignorant de « tenir jusqu'à la mort », dégager une grande partie de ses forces de Stalingrad, il acceptera de rester enfermé dans la nasse glacée de la Volga et de devenir le premier maréchal captif de l'histoire militaire. Cette faiblesse de Rosenberg, Frank, Keitel, Paulus et tant d'autres, explique l'acceptation du crime permanent par un personnel politique ou militaire qui s'était livré, mains liées, à son dictateur. C'est l'une des révélations de ces interrogatoires, témoignages, documents de Nüremberg et d'autres procès que Christian Bernadac présente dans ce livre. Un dossier indispensable - le plus complet jamais publié - pour mieux comprendre la réalité de l'horreur de la guerre dans les territoires d'Europe de l'Est.