Résumé
Alain Spiraux n'a pas eu l'intention, avec son nouveau roman : « La Dénonciation », d'ouvrir un procès. Un procès contre « X », comme on dit. Des « X » bien nombreux puisque, on le sait mais on préfère le taire, des tonnes de lettres anonymes sont parvenues aux diverses « Kommandantur » de la France occupée. Sans oublier les commissariats de police et les organisations collaborationnistes. Quand on évoque ces dénonciateurs, on a l'impression de parler de Martiens, des habitants d'une autre planète. Et pourtant, ils étaient parmi nous ! À tous les échelons de la société : ouvriers, intellectuels, membres de professions libérales, classes moyennes, etc. etc. Ils ressemblent à chacun de nous. Peut-être s'en trouve-t-il parmi vos voisins, vos amis, voire dans votre famille. Ils n'ont pas disparu, continuant d'œuvrer dans l'ombre. Pendant l'occupation, ils dénonçaient des juifs et des communistes. Puis, ils ont choisi des collaborateurs pour cible, au moment de l'épuration. Plus tard, ils s'en sont pris aux activistes de l'O.A.S. (200 lettres anonymes par jour, durant les temps troublés de la guerre d'Algérie). Aujourd'hui, ils dénoncent encore : des fraudeurs du fisc, des dépravés sexuels. Qui dénonceront-ils demain ? Est-ce par « bonne conscience » que sur le voile de l'anonymat, on jette également celui du silence ? Une dénonciation de... la dénonciation ne s'avère-t-elle pas utile ? C'est pour cette raison que dans son roman, l'auteur a donné le principal rôle à un dénonciateur des juifs, pendant l'occupation. Fait sans précédent de la littérature d'après-guerre. À ce personnage, qui n'est pas un portrait-robot de la dénonciation, Alain Spiraux a permis de s'expliquer, de se justifier. Ce qu'on lui reprochera, sans doute. Mais ce « voyage au bout de la nuit », l'auteur s'était juré de l'entreprendre. Peut-être pour rencontrer, dans les méandres de son imagination, celui qui dénonça sa propre famille, en 1942. Voyage qui n'est pas sans comporter des risques. Ceux de déplaire, par exemple, voire de choquer, à une époque où l'on préfère plutôt s'identifier à des héros comme Astérix ou Thierry-la-Fronde. Portraits tellement plus flatteurs ! Avec « Le Délire de Gilles Frimousse », Alain Spiraux entraînait ses lecteurs dans le domaine du fantastique et de l'humour. Cette fois, il s'aventure dans une jungle où vivent des êtres hideux, mais bien réels. C'est moins plaisant. Mais on ne choisit pas toujours son parcours.