Résumé
Pour l'herbier, Jean-Paul Colin a eu bien raison de se jeter dans les eaux bouillonnantes de la mémoire, de lui faire éperdument confiance et la laisser, source parfaite, rafraîchir tous ses souvenirs ramenés à la surface. Lui permettre de les charrier, les caresser, les façonner aussi pour en faire une autobiographie-fiction ou l'inverse. Peu importe la réalité évanescente des fruits qui tomberont d'un arbre décrit maigre et haut, mal poussé, pas épanoui, pas majestueux, pourvu que celle-ci rosisse à nouveau quelques joues, sèche quelques larmes parlant d'un fils qui parle des ses parents, de ses grands-parents, de ses oncles, tantes, cousines et amis. Sans oublier l'espoir incrédule des retrouvailles au-dessus de l'humus. Un brin de Pergaud pour l'écureuil et les noisettes du grenier, de Balzac pour l'opulence rance des salons bourgeois, de Chateaubriand pour Eugénie qui se glisse frileusement sous la pierre plate, de Proust pour le froufroutement des robes, de Baudelaire au bras d'une coquette maigre aux airs extravagants pour les ballets involontaires, dans le champ d'épis dorés de Jean-Paul Colin, seul maître de cette peinture du temps et des saisons, des âmes... dont le talent est de rapprocher le coeur des mains. "Le fils va renouer le dialogue avec les meubles de son jeune âge, avec les tableaux qu'il dévisageait dans ses jours de fièvre, jusqu'au vertige. Il comprend seulement alors à quel point ce décor, qui a voyagé dans le monde presque entier, a toujours fait partie de lui-même, à son insu. Il passe des nuits délicieuses et apaisantes dans cette maison morte, où ne vit plus que l'essentiel. Il a remis en marche la pendule qui sonnait jadis l'heure des petits bonheurs..."