Résumé
Après nous avoir donné, en 1951, "Les musiciens romantiques", Robert Pitrou nous en propose comme le prolongement, avec une série d'études, qui part de Charles Gounod pour aboutir à Paul Dukas. La période d'avant Debussy, pourrait-on dire. Tour à tour, on verra reparaître, non seulement l'auteur de "Faust" et de "Roméo", mais ceux qui l'ont suivi et qui, œuvrant dans une ère de sécheresse musicale (le Second Empire particulièrement), ont provoqué l'éclosion d'une nouvelle École française et permis un renouveau magnifique de notre musique nationale. Et d'abord Saint-Saëns, combatif et combattu, mais dont on reconnaît chaque jour plus la considérable valeur : "musique tirée à quatre épingles", dira Vladimir Jankélévitch, mais dont l'importance - sinon la vénusté - peut être de moins en moins mise en doute. Comme lui, Édouard Lalo ramène les Français à la musique de chambre, ce qui ne l'empêche pas de leur fournir, avec "Le roi d'Ys", un modèle d'opéra que nulle mode ne fera oublier. Plus de dix ans avant lui, aussi bien, Georges Bizet avait apporté, avec "Carmen", un idéal d'opéra que ses successeurs imiteront sans l'égaler. On s'aperçoit de plus en plus, aujourd'hui, qu'un "fantaisiste" comme Emmanuel Chabrier a été un grand novateur, et qu'il a tracé au langage musical des voies absolument neuves. Puis, voici encore deux grands maîtres, parfaitement différents : Gabriel Fauré, d'une part, l'auteur des "Mélodies immortelles" et de "Pénélope" et, d'autre part, César Franck, né belge, naturalisé français, qui fait lui aussi entendre des accents profonds et nouveaux. Un élève de Franck, Henri Duparc, trop vite terrassé par la maladie, élève la mélodie à des hauteurs que Fauré lui-même n'a pas atteintes. Un autre disciple du même maître, Ernest Chausson, interrompt trop tôt une carrière brillamment inaugurée. Et vient enfin celui qui, trop volontiers, aurait accaparé pour lui seul l'héritage de Franck, ce Cévenol autoritaire que fut Vincent d'Indy. Volonté implacable au service de notre musique. Et, pour terminer cette brillante pléiade, un modeste, un solitaire, mais de haut lignage : Paul Dukas, l'érudit auteur d'"Ariane et Barbe Bleue". Splendide floraison, qui permet à Norbert Dufourcq de parler d'un "troisième âge d'or de la musique française", et à Robert Pitrou d'affirmer qu'aujourd'hui encore "Paris, comme capitale musicale, dépasse de loin Vienne, Londres, New-York", sans parler bien entendu de Berlin. Peut-être n'était-il pas inutile que ces choses là fussent dites et que fut magnifiée une des plus glorieuses périodes de notre musique nationale.